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Les excès dans le cadre de l'utilisation de la "Monnaie" par les autorités finissent toujours mal

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Plusieurs évènements inédits se conjuguant :

§ Risques de pénuries énergétiques et perturbation des chaînes d’approvisionnement.

§ Hausse des taux mettant en péril le financement des dettes accumulées, après un cycle de 50 années de baisses de taux et d’accommodements monétaires toujours plus extrêmes (notamment sur ces 12 dernières années de quantitative easing* faisant suite à la crise des subprimes en 2008, avec en apogée les injections monétaires de la crise Covid).

§ Scénario de stagflation.

§ Aggravation des tensions géopolitiques entre le monde occidental et le bloc Chine/Russie.

§ Les perturbations liées au Covid, toujours d’actualité malheureusement.

* Rachat d’actifs par la banque centrale sur les marchés, avec de l’argent qui n’existe pas.

Il peut être bénéfique de prendre du recul et d’essayer d’anticiper quelle sera la variable d’ajustement permettant de résorber les excès.

Nous allons donc nous intéresser à la monnaie, tant celle-ci a pu être historiquement LA variable d’ajustement aux graves crises. De tout temps, les autorités ont été tentées d’utiliser jusqu’à l’excès l’instrument monétaire à des fins politiques. Cela s’est toujours extrêmement mal terminé. Est-ce différent cette fois ?

La monnaie papier aurait été inventée par les Chinois au XIe siècle, tentés de trouver un moyen de substitution au cuivre, utilisé jusqu’alors pour monnayer leurs transactions. Les limites ayant été atteintes car le cuivre disponible ne permettait plus de suivre le rythme de la croissance des échanges, des billets d’escompte ont été créés, échangeables contre du fer. Les marchands de métaux se sont mis à créer des billets d’escompte même s’ils n’avaient pas assez de fers et de métaux précieux par rapport aux billets émis. S’en est suivi l’inflation, l’hyper inflation puis l’effondrement de la monnaie.

Idem pour la Dynastie des Songs, avec un principe de monnaie papier, mais seulement émise par la Dynastie des Songs. S’en est suivi un effondrement similaire : la monnaie papier émise en trop grande quantité perd la confiance des citoyens, vaut de moins en moins, et finit par ne plus être acceptée.

Puis, un principe similaire a été mis en place avec la Dynastie Yuan, il s’agissait du même principe mais avec des restrictions. Les restrictions ont été contournées, ce qui a également mené à l’effondrement.

En 1694, l’Empire Britannique mené par le Roi William III a été ruiné par la guerre avec les Français. Les banquiers européens proposent au Roi un marché : bénéficier de l’autorisation d’émettre de la monnaie papier, et obliger les citoyens à l’utiliser. En échangent, les banquiers offrent au Roi un financement illimité pour faire la guerre. Le Roi accepte, la Banque Centrale d’Angleterre est créée et détenue par les banquiers européens privés.

1.2 millions de livres sont ainsi prêtées au roi d’Angleterre. La moitié a été consacrée à la Royal Navy et a permis de reconquérir le monde. La guerre a donc été financée à crédit et a permis de coloniser de plus en plus de pays, tout en faisant la fortune des banquiers.

En 1722, l’Empire d’Angleterre représentait 1/5e de la population mondiale. Mais la logique de conquête ininterrompue trouva ses limites. Dans les années qui ont suivi, nous avons pu assister à un déclin / perte de puissance (perte colonies Inde – Amérique) de l’Empire.

Jusqu’en 1776, les Etats-Unis étaient une colonie de l’Angleterre. Le Tea Party est révolté de la taxation du thé par l’empire britannique, ce qui a mené à l’indépendance des Etats-Unis dans le cadre d’un désir de liberté et de séparations des pouvoirs dans la constitution : l’exécutif, le législatif et le judiciaire. Avec en parallèle un congrès seul habilité à émettre de la monnaie. Principe qui a été violé par la FED, nous y reviendrons.

Thomas JEFFERSON, l’un des cinq rédacteurs de la Constitution, président des Etats-Unis de 1801 à 1809, insista bien sur ce point : « Si le peuple américain permet un jour que des banquiers privés contrôlent leur monnaie, les banques et toutes les institutions qui fleuriront autour des banques priveront les gens de toute possession, d’abord par l’inflation, ensuite par la récession, jusqu’au jour où leurs enfants se réveilleront, sans maison et sans toit, sur la terre que leurs parents ont conquise. »

Les banquiers européens voient quant à eux le déclin arriver, et veulent répliquer le modèle de banque centrale aux Etats-Unis. Mais les pères fondateurs avaient prévu les gardes fous en la matière. Une première tentative a eu lieu en 1791 avec un bail de 20 ans, puis une autre en 1811, avec un renouvellement de bail non voté à une voix près. Les banquiers européens créeront une nouvelle banque centrale avec un bail de 20 ans, en 1816, dans le cadre d’une seconde tentative. Le président Jackson est contre. Il subira une tentative d’assassinat en 1835. En 1836, il met son véto et empêche tout renouvellement du bail de cette 2e banque centrale.

De 1860 à 1865, Lincoln est au pouvoir. En 1862, il fallait financer la guerre. Les banquiers proposent des prêts à 20 %. Lincoln décide de créer la propre monnaie des Etats-Unis : les « Greenbacks » émis directement par le gouvernement des Etats-Unis. Le gouvernement ne paie aucun intérêt. En 1865, Lincoln est assassiné.

En 1881, Garfield, le nouveau président eut ces mots : « Celui qui contrôle le volume de la monnaie dans notre pays est maître absolu de toute l’industrie et tout le commerce… et quand vous réalisez que le système entier est très facilement contrôlé, d’une manière ou d’une autre, par une très petite élite de puissants, vous n’aurez pas besoin qu’on vous explique comment les périodes d’inflation et de déflation apparaissent. » Il fut assassiné dès l’année de son élection.

En 1910, se déroule une réunion entre les banques JP Morgan, Rothschild, Citibank et Rockefeller dans le but de réformer en profondeur le système bancaire.

Le 23 décembre 1913, un vote intervient au congrès pour la création de la FED, une banque privée détenue par les banquiers privés, ayant le privilège d’émettre des dollars. Dans ce cadre, les obligations émises par le Trésor peuvent être achetées par la FED, à laquelle seront payés des intérêts, fixés par elle-même.

En 16 ans, de 1913 à 1929, l’une des bulles de création monétaire les plus spectaculaires de l’histoire a été gonflée, ce qui mena à la grande dépression, menant elle-même à la 2nd guerre mondiale.

Au lendemain de la seconde guerre mondiale, l’Europe et l’Asie sont exsangues et les Etats-Unis ressortent comme les grands gagnants avec 75 % des réserves mondiales d’or en leur possession.

Les Etats-Unis imposent le dollar comme monnaie mondiale de réserve et d’échange, en mettant en place les accords de Bretton Woods. Une parité fixe est instaurée avec les autres monnaies contre le dollar, et ce dernier est le seul à être rattaché à l’or, pour 35 dollars l’once.

Puis il a fallu financer les guerres de Corée, du Vietnam… Ce qui a généré des déficits américains (budgétaire / balance commerciale) en parallèle de la délocalisation des entreprises.

La planche à billets tourne à pleins régimes, l’impression monétaire devient de plus en plus décorrélée de la quantité d’or présente dans les coffres.

En 1963, Kennedy tente de reprendre la main sur la création monétaire. L’Executive Order 11110 permet la création de US notes émises par le gouvernement américain, en remplacement des FED’s notes. Il sera assassiné 5 mois après l’écriture de cette directive.

En 1965 de Gaulle voyait que les USA achetaient des sociétés françaises grâce à un dollar américain surévalué.

Il a demandé à échanger des dollars accumulés contre de l’or américain, et a même proposé d’envoyer un porte avion. S’en est suivi mai 1968, et il aura été remplacé par Pompidou (au passage, un ancien de Rothschild).

En 1971, Nixon met fin à la parité fixe dollar – or. C’est le début du « c’est notre monnaie, c’est votre problème ». Toutes les monnaies deviennent flottantes et ne sont plus rattachées à un actif tangible. La création de monnaie et de dettes devient illimitée, et a été exponentielle depuis 1971.

Elle s’est accrue à l’occasion des suites de la crise des subprimes en 2008, et est devenue caricaturale avec la crise Covid :

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Total de la dette US sur une période plus longue :

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Évolution du pouvoir d’achat d’un dollar américain au cours du siècle dernier :

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Lorsqu’il n’y a plus d’alternatives, les profondes modifications de régime se réalisent par la monnaie, d’où l’érosion monétaire inéluctable au fil du temps, surtout lorsque les pouvoirs politiques prennent le contrôle de l’émission monétaire.

Et en France ?

En 1715, Louis XIV vient de décéder. Après beaucoup de guerres, les finances sont désastreuses, et Louis XV lui succède. Comment ne pas citer l’économiste John Law et sa grande expérience monétaire, lorsqu’il imita l’Angleterre et créa la Banque Générale.

 

En 1718, celle-ci devient la Banque Royale garantie par le roi Louis XV, et émet sa propre monnaie papier. De plus en plus, jusqu’à un rythme effréné. Cette expérience se finira par l’inflation, l’hyperinflation, un énorme krach et la ruine généralisée.

 

En 1789, la Nouvelle République a besoin d’argent. Elle confisque les biens immobiliers du Clergé, mais cela prend du temps. Il est donc décidé de créer une nouvelle monnaie papier : les Assignats, adossée aux biens du clergé. En 1790, ceux-ci deviennent la monnaie officielle, permettant de reflouer les caisses et de vendre les biens du Clergé aux français qui deviendraient donc plus fidèles à la Nouvelle République. Les caisses se sont vidées, plus d’Assignats ont été créées, et vous connaissez la suite… Inflation, Krach… 1796 : fin des Assignats.

 

En 1800, la Banque de France est créée, constituée sous forme de SA privée. En soutien de Napoléon, elle émet de la monnaie contre des intérêts. En 1803, la Banque de France obtient le privilège de l’exclusivité d’émettre de la monnaie. La couverture des billets est réalisée par la détention en contrepartie de 35 % d’or, ce qui limitait la croissance monétaire.

 

Jusqu’en 1897, l’émission de monnaie ouvre droit à intérêts, mais à partir de 1897, l’argent mis à disposition de l’Etat devient gratuit.

 

En 1936, nous assistons à la mise en place d’un cours forcé. Les billets ne sont plus échangeables contre de l’or. Le change devient flottant.

 

1944 : Accords de Bretton Woods (cf. plus haut)

 

En 1945, la Banque de France est nationalisée.

 

1971 : abandon des accords de Bretton Woods par Nixon. De ce fait, le franc devient une monnaie flottante.

 

En 1972, Pompidou décide de baisser le taux de TVA de 23 % à 20 % avec Giscard. Nous assistons donc à une baisse des revenus de l’Etat et à un creusement des déficits.

 

En 1973, de nouvelles conditions concernant les emprunts d’état, avec 10.5 milliards de francs ne portant par intérêts (une forme de « planche à billet » mise en place par la Banque de France), puis un intérêt faible pour les 10 milliards de franc suivants.

 

Nous assistons en parallèle à la mise en place « d’emprunts Giscard » à 7 % d’intérêts, indexés sur l’or. Le coût de cet emprunt pour les finances publiques explose.

 

La valeur du franc est divisée par 3.5 entre 1973 et 1988.

 

La loi de 1973 est abrogée en 1993 pour une mise en conformité avec le Traité de Maastricht. Il devient donc interdit pour l’Etat de s’endetter en empruntant à la Banque de France.

 

En 1998, la Banque de France est intégrée au SME.

 

La Banque Centrale Européenne (BCE) est créée, et détenue par les banques nationales, avec interdiction de prêter directement aux gouvernements.

 

La BCE fixe les taux d’intérêts européens, avec pour mandat principal de maîtriser l’inflation.

 

En dépit de ces sages principes de départ, les largesses monétaires n’ont pas mis beaucoup de temps à apparaître :

 

Le 10 mai 2010, la BCE achète pour 72 milliards de dettes gouvernementales sur la marché secondaire (mécanisme SMP).

 

En décembre 2011, la BCE prête de manière illimitée aux banques pour 3 ans, à un taux de 1 %.

 

En septembre 2012, le mécanisme OMT (programme de rachat massif de titres de dette publique) est mis en place, en violation directe des statuts de la BCE.

 

Les MES, FESF et autres quantitative easings qui ont suivi auront pour corolaire l’augmentation inédite du bilan de la BCE et de l’endettement des Etats et des agents privés, avec l’apothéose lors de la crise Covid : 4 000 milliards de facilités monétaires créées et déployées en seulement quelques mois.

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Les taux directeurs inférieurs à 0 % et l’augmentation du bilan des principales banques centrales de la planète, dont fait partie la BCE, entraîneront la bulle d’actifs que nous connaissons aujourd’hui, l’une des plus grosses bulles financières de tous les temps.

 

L’histoire reste à écrire : le retour de l’inflation, en tant qu’effet collatéral des politiques monétaires inédites pratiquées à notre époque, pourrait être un premier signal de retour à la réalité.

 

Si l’inflation se révèle persistante, les autorités vont devoir la combatte par une remontée de taux (pour l’instant, la BCE « observe » en attendant qu’elle se calme d’elle-même…).

 

Rappelons que pour combattre l’inflation, en théorie économique, il faudrait remonter les taux directeurs au-dessus du taux d’inflation.

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Imaginons le désastre s’il fallait que les taux de refinancement (bleu) dépassent le taux d’inflation (rouge), dans un contexte de suraccumulation de dette et d’excès spéculatifs. Et la quantité de monnaie qui serait désespérément créée par les autorités en réaction aux dislocations engendrées.

Inflation, Krach, Hyperinflation ?

Andy BUSSAGLIA est conseiller en gestion de patrimoine depuis plus de 12 ans.

Il est associé-gérant du cabinet Mon Bureau Patrimonial.

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